ARTISTES LEVEL UP | RÉMY MPUKI

mecredi 1 septembre 2021

« Mes valeurs sont hip hop et clubbing. Les valeurs du hip hop sont peace, love, unity, having fun. Moi je suis vraiment en paix avec tout le monde, et la culture clubbing m’a appris la tolérance.»

Danseur montois actif depuis 2012, Rémy Mpuki-Lutété est freestylerchorégraphe et interprète mais pas seulement. Rémy est aussi DJ. Passionné de hip hop, féru de house et de popping, il s’inspire également de la dancehall, des danses afro et de la capoeira. À titre d’info pour les non-initiés, le popping est une danse appartenant aux styles funks. Plus connu sous le nom de smurf, son principe de base est la contraction et décontraction des muscles, opérées en rythme sur la musique.

Né en Belgique d’un père congolais et d’une mère italienne, Rémy Mpuki commence la danse à l’âge de 15 ans. Il découvre sa passion lors d’un stage, s’adonne alors à la chorégraphie et bifurque rapidement vers le freestyle. À 17 ans il enchaîne les formations, participe à de nombreux workshops, suite à quoi il se forme à la mise en scène. À 24 ans, son projet Les Épines de la Rose lui permet d’être sélectionné pour intégrer Level Up, un dispositif de professionnalisation mis en place par Lezarts Urbains. Calme et discret au premier abord, le jeune danseur n’en est pas moins bouillonnant sur scène.

Rencontre avec un artiste tant passionné que prometteur :

LZU – Qui est Rémy Mpuki ?

RM – (rires, ndlr) « Un danseur de Mons. Danseur interprète, hip hop, house, aussi chorégraphe maintenant, et DJ. »

LZU – À quel âge as-tu commencé la danse ?

RM – « À 15 ans. J’ai suivi mon tout premier stage de danse quand j’avais 15 ans. »

LZU – Pourquoi la danse ?

RM – « Parce qu’elle me procure des sensations très intenses. En comparaison j’ai commencé le basket à 4 ans, j’en ai fait jusqu’à mes 18 ans, mais j’ai choisi la danse parce qu’elle me fait sentir beaucoup plus d’émotions, plus de sensations en fait. »

LZU – Quelles sont les émotions que tu ressens en dansant ?

RM – « Liberté, c’est le mot qui me vient en premier. C’est un mot vaste mais c’est vrai que mon corps peut aller n’importe où, du moment qu’il est sur la musique. Ouais, c’est vraiment ça, du moment que je me sente bien avec la musique. »

LZU – Quels sont les styles de danse que tu pratiques ?

RM – « J’ai commencé avec le hip hop, le groove, la hype, le new jack swing aussi. Ça c’était avec Baloo (The Cage, ndlr). Après, j’ai eu cours avec Ibrahim (Junbox). Lui il m’a appris le body control, les isolations. Donc un peu le popping on va dire. Y a eu Dios aussi, c’était un peu le même style. Après j’ai commencé la house, j’avais 19 ans. Je m’inspire aussi de la capoeira que je fais avec Joseph. Je n’ai jamais vraiment pris de cours de capoeira mais j’aime bien la culture. J’aime bien la danse aussi, je trouve qu’elle est très belle. Donc je me nourris le plus de hip hop, de house, de capoeira, des danses africaines aussi. Étant aussi moitié africain je me nourris naturellement de cette fibre. »
 
LZU – Tu as une préférence ?

RM – « Mes deux principaux styles sont vraiment le hip hop et la house, et je ne peux pas dire que j’aime plus l’un que l’autre. Le hip hop ou la culture clubbing ce sont deux cultures qui me tiennent vraiment à cœur. Je ne pourrais pas choisir. »

LZU – Et tu as une préférence entre le freestyle et la choré ?

RM – « Ouais, moi je suis un freestyler de base, mais j’aime trop créer, c’est juste que retenir des chorégraphies je n’aime pas forcément ça. Et ce que je préfère par-dessus tout c’est vivre le moment, improviser, freestyler quoi. »

LZU – Tu préfères danser solo ou en collectif ? 

RM – « En fait, dans ma vie et dans ma carrière de danseur je suis assez solitaire. Quand je suis seul je suis pleinement moi-même, j’ai de meilleures sensations. J’ai toujours été seul, à part quand j’ai commencé. Là j’étais dans un collectif (Whiteless Crew, ndlr) mais bon, c’était vraiment le début. Après j’aime aussi le partage. J’aime bien danser avec les gens pour observer les styles des autres et m’en nourrir, je vais prendre des infos un peu partout. Genre il y a deux ans j’suis allé à Paris tout seul, j’ai pris une semaine de stage. Mais ouais, quand je travaille, quand je vais à une session par exemple, je ne vais pas tout de suite danser avec les autres, je vais d’abord m’entraîner seul, et après je vais partager avec eux quoi. »

LZU – Tu bosses sur quoi en ce moment ?

RM – « Là je suis interprète sur deux créas différentes, BE THE RYTHM de Briana Ashley Stuart et BULLY (Because You Loved Loathing Yourself, ndlr) de Thomas Ntamashimikiro. Puis je suis sur ma première création en tant que chorégraphe, LES ÉPINES DE LA ROSE un projet sur lequel je travaille avec Lezarts Urbains. »

Popping Danys & Anke Clinke - Les Épines de la Rose © Caroline Lessire

LZU – Tu peux nous en dire un peu plus sur ta pièce, Les Épines de la Rose ?

RM – « Alors, Les Épines de la Rose c’est une performance de danse-théâtre mise en scène au travers d'une création musicale jazz. Elle illustre une double relation conjugale entre Malvine, Suzy et Iraknel. L'histoire pose la question universelle et intemporelle de l'impact de l’adultère sur les relations humaines. Les thèmes abordés sont l’amour, la trahison, la manipulation et le pardon. Elle est interprétée par trois danseurs : Iza Audoan qui vient de Liège (Le Cube, ndlr), Popping Danys (Danys Vanderhaegen, ndlr) de Bruxelles et Anke Clinke, une wackeuse de Gand. »
 
LZU – Et tu l’as écrite il y a combien de temps ?
 
RM – « J’ai commencé à écrire la pièce en mars 2021. Je me suis d’abord penché sur la dramaturgie, j’ai vraiment écrit. J’ai décliné les scènes et après j’ai contacté les danseurs. Du coup maintenant j’ai mon équipe au complet. J’ai deux compositeurs aussi, Adrien Sassier et Thomas Garnett, et sept musiciens qui vont accomplir la compo. »
 
LZU – La bande son est préenregistrée ou les musiciens seront sur scène avec les danseurs ?
 
RM – « En fait, moi j’aimerais bien les mettre sur scène justement, mais c’est difficile de tourner avec trois danseurs et sept musiciens. Du coup je vais faire une bande son de sorte à pouvoir tourner rien qu’avec mes trois danseurs, mais si je propose la pièce à un théâtre ou quoi, je proposerai d’inclure les musiciens aussi. Peut-être pas tous mais deux ou trois. Mais ça, ça doit encore se fixer. Mais c’est clair que j’aimerais bien, et ça donnerait encore mieux de les avoir sur scène c’est sûr. »
 
LZU – Tu peux nous parler un peu de ton parcours de chorégraphe ?

RM – « Ici c’est ma première création en tant que chorégraphe (Les Épines de la Rose, ndlr). Après j’ai des donné des cours de danse donc ça va, mais pour moi apprendre les bases, faire des petites chorés, ça n’a rien à voir avec la création. Sinon j’ai fait deux créative boils avec Owdi au Zinnema, on est par groupe de trois, et on doit créer un spectacle en un weekend. On a des coaches, des intervenants qui viennent nous aider. Et j’ai aussi fait le Groundwork avec Cindy Claes, c’est un stage à la création d’une semaine à Destheleide. Il y avait différents workshops, on a eu Yves aussi, Yves Ruth. Ça m’a beaucoup appris, ça m’a vraiment beaucoup appris ouais. Mais donc voilà, mon parcours en tant que chorégraphe, je pars sur ma première création. »

LZU – Comment fait-on pour vivre de la danse en Belgique ?

RM – « Ça dépend. Il y a plusieurs façons, il y a plusieurs profils en fait. Par exemple Alex The Cage lui il est spécialisé dans le battle. Son public ce sont les freestylers et les gens qui vont le payer pour prendre ses cours. Donc d’abord les cours, puis les battles qu’il va gagner. Pour d’autres c’est la chorégraphie et eux ils peuvent accompagner des chanteurs par exemple. Maintenant ça se complexifie avec les réseaux sociaux. Par exemple Jenny (BSG, ndlr), grâce à son réseau elle a tellement de gens qui la suivent qu’en fait elle peut juste faire une publicité, et elle a une communauté tellement immense que ça lui suffit. Donc voilà. Après il y a les créations, tourner en théâtre, moi c’est vers ça que j’ai envie de me tourner. J’ai envie de m’exprimer par ce biais-là. J’aime bien la pédagogie, j’aime bien donner cours, mais cette année j’ai arrêté pour pouvoir être focus sur mes projets. En fait j’en donne encore un peu mais seulement des cours privés. Du coup voilà, les battles, les cours, tourner dans des théâtres, accompagner les chanteurs sur scènes ou dans des vidéoclips. Il faut juste trouver à travers quoi on préfère s’exprimer et travailler pour aller dans cette direction-là. »

LZU – Tu es aussi DJ (DJ Mpuki, ndlr), peux-tu nous expliquer comment tu es passé de la danse aux platines ?

RM – « Comme j’ai toujours baigné dans la culture hip hop et house, c’est venu assez naturellement. Déjà quand j’étais plus jeune je voulais faire de la musique, j’ai aussi fait un peu de batterie. J’ai toujours aimé la musique, donc j’ai passé le pas, j’ai acheté un contrôleur et je m’y suis mis. J’ai commencé il y a deux ans pendant le premier confinement, je mixais mes styles de prédilection. Donc house et hip hop. Après je mixe un peu de tout, afro etc. mais je suis plus spécialisé en house et hip hop. J’ai d’abord pris le temps de me perfectionner chez moi, puis il y a deux mois j’ai mixé pour la première fois pour une session house de Raquel (Suarez, ndlr) ici à Bruxelles. Et le mois passé pour le Detours, c’était un battle house. Plus récemment j’ai mixé pour un festival, c’était vraiment super, l’énergie était vraiment intense. Mais c’était mes trois premières scènes, là je réseaute parmi les gens du milieu pour pouvoir mixer dans les battles. Je cible aussi l’événementiel pour pouvoir mixer dans des boites de nuit ou autres événements, toute sorte de chose quoi. »

LZU – Quels sont tes projets à court et moyen terme ?

RM – « À court terme ce serait d’avoir le statut d’artiste, de faire tourner mes créations. Les Épines de la Rose en premier lieu, je veux d’abord faire celle-là. Par après j’aimerais continuer le processus créatif en tant que danseur interprète et en tant que chorégraphe, continuer à faire d’autres créations. Mais bon chaque chose en son temps c’est clair, mais voilà. Ça c’est vraiment en tant que chorégraphe. Après en tant que DJ je voudrais mixer dans des battles ou dans des événements, dans des festivals, j’aime vraiment bien mixer en festival. Et puis voilà en gros. Pour l’instant je sais qu’il y a plus de travail à Bruxelles, mais une fois que t’es à Bruxelles tu te dis qu’il y a plus de travail à Paris, etc. Et à long terme finir ma vie finir au soleil, ça ce serait l’idéal. Parce que je te parle de l’artistique mais j’ai aussi envie de me développer dans l’entrepreneuriat. Ça pourrait être lié à la danse, genre faire des événements, mais ça pourrait aussi être exclusivement financier, genre, j’sais pas, ouvrir un magasin peut-être. »

LZU – Est-ce que tu te considères hip hop ou urbain ?

RM – « Je me considère dans la culture hip hop et dans la culture clubbing. Parce que mon art, mes valeurs, sont hip hop et clubbing. Les valeurs du hip hop sont peace, love, unity, having fun. Moi je suis vraiment en paix avec tout le monde, et la culture clubbing m’a appris la tolérance. Je ne dis pas qu’il n’y a pas de tolérance dans le hip hop mais dans la culture clubbing c’est encore plus tolérant. On voit des gens d’un peu partout, c’est plus ouvert, il y a plus de genres différents. Par exemple la communauté homosexuelle dans le hip hop c’est compliqué pour eux, alors que dans la culture clubbing c’est normal en fait. Et c’est vrai que moi je suis rentré d’abord dans la culture hip hop, et donc jusqu’à mes 18, 19 ans je n’avais jamais vraiment parlé à une personne homosexuelle, je n’avais pas d’infos. Et du coup, peut-être que d’une certaine manière ma tolérance n’était pas la même parce que j’avais moins d’infos que quand j’étais dans la culture clubbing, où j’ai appris à accepter chaque personne comme elle est, et à être beaucoup plus tolérant en fait. »

LZU – Du coup le mot urbain en rapport à la culture, ça te parle ?

RM – « On dit urbain pour tout ce qui n’est pas occidental en soi. Tout simplement. C’est vrai qu’avant c’était différent. Si tu regardes les vidéos d’archives en 1980 tu vois les breakers et tout ils sont dans la rue, et donc à ce moment-là on peut parler de danse urbaine parce que ça se fait vraiment dans la rue, mais après c’est plus la street qu’urbain. Même moi je viens de Mons mais à la base je viens d’un petit village, mais la danse elle est née à New-York et donc on a dit, ouais ça c’est une danse urbaine. Perso je n’utilise jamais le mot urbain pour définir ce que je pratique. »

LZU – Pourquoi as-tu rejoint Level Up ?

RM – « Parce que je trouvais que c’était bien pour mon projet, Lezarts Urbains peut m’aider à avoir des salles. Les modules sont très intéressants aussi, que ce soit pour ma carrière de chorégraphe ou de danseur comme pour celle de DJ, parce qu’il y a des modules comme Droits d’Auteurs et tout, et c’est vraiment intéressant. Du coup j’ai postulé pour ça, pour l’accompagnement et pour les modules. »

LZU – Qu’attends-tu concrètement de Level Up et de Lezarts Urbains ?

RM – « J’attends l’accompagnement justement, qu’ils puissent me trouver des salles, des dates, des partenaires. M’aider à me professionnaliser en fait. »

Propos recueillis par Melissa Farah

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